Il y a des moments ou des circonstances dans lesquels aucune décision à prendre, pour un sujet devenu particulièrement exigeant, ne peut plus satisfaire personne. Et pourtant, une décision doit etre prise. Dans ces circonstances, en général, on fait tout pour ne pas décider, le plus longtemps possible. Jusqu’à se trouver dans une impasse.
C’est ce qui vient de se passer à propos de l’aéroport Notre Dame des Landes. Ce projet a plus de 20 ans. De reculade en reculade, d’occupations violentes en référendum régional, on en est arrivée à une impasse, dont une ultime commission n’a pas permis de sortir.
Cela renvoie en fait à un problème infiniment plus ample : comment les institutions démocratiques, qui doivent rendre des comptes à intervalles très brefs, peuvent-elles prendre des décisions dont l’impact est de très long terme ? Ce que je nomme aussi des « décisions positives ».
Si les institutions de la république ne sont ressenties comme légitimes pour prendre ce genre de décision, d’autres mécanismes s’installent, par lesquels les décisions sont imposées, par un pouvoir autoritaire, ou par des groupes de pression, à un pouvoir démocratique trop faible pour prendre ses responsabilités.
L’occupation de la zone de l’aéroport ouvre la voie à ce genre de dérives. Laisser les zadistes imposer leur point de vue, meme s’il était justifié, serait une négation de la démocratie, extrêmement grave, puisque cela donnerait le sentiment qu’un terrorisme vert est légitime. Il est donc, dans un premier temps, essentiel de ne pas laisser occuper la ZAD durablement. Sans doute faudra-t-il pour y parvenir utiliser des moyens très importants de police démocratique, tant dans la ZAD elle-même que dans les villes voisines, en tentant d’éviter toute bavure, et organiser une évacuation rapide, avant meme l’annonce de toute décision sur le fond.
Si le temps était encore disponible, s’il était possible de retarder encore la décision, il faudrait surement renvoyer la décision à une « Chambre des Générations Futures », constituée de façon démocratique, et qui prendrait sa décision en fonction de l’intérêt des générations futures. S’il n’était plus temps de réfléchir encore, le gouvernement pourrait, seulement après avoir fait évacuer la ZAD, prendre sans risque l’une quelconque des décisions ; parce qu’il aurait fait avant respecter l’état de droit. Pour ma part, je déciderai de ne pas construire cet aéroport, mais seulement après avoir fait évacuer la zone. Pas avant.
Si on n’agit pas, si on laisse la rue imposer son point de vue, on verra ce terrorisme vert faire la loi sur bien des sujets, comme les centrales nucléaires, les tracés de tgv, l’implantation des centres de gestion des déchets. Et on passera un jour d’un terrorisme vert à une dictature verte.
Cette question se pose aussi pour les entreprises, qui doivent à la fois satisfaire leurs actionnaires, à la recherche de profits immédiats, et servir les interets de long terme de leurs consommateurs, de leurs salariés, et des autres parties prenantes, dont les générations suivantes.
Etre positif, c’est-à-dire travailler dans l’intérêt des générations futures, tel est le principal enjeu des temps qui viennent.