Rien ne ressemble plus à 2013 que 1913.
Cette année là, une formidable période de croissance butait sur une crise financière provoquée par la première puissance economique du moment (La Grande Bretagne).
De formidables progrès techniques, en matière d’énergie et de communication (électricité, automobile, avion, radio, sous-marin) annonçaient des lendemains qui chantent.
Un grand nombre de mouvements favorables à la démocratie se faisaient jour en Amérique latine, en Afrique, en Russie, en Asie. Mais aussi, commençaient à sévir des mouvements terroristes (qu’on nommait alors « nihilistes »).
Des idéologies totalitaires dénigraient l’économie de marché et la démocratie; et annonçaient leur intention de combattre l’idéologie des droits de l’homme.
Pourtant, cette année là, 1913, personne ne connaissait le nom de Lénine, qui allait prendre le pouvoir en Russie 4 ans plus tard. Encore moins celui de Mussolini, qui marcherait sur Rome 7 ans plus tard, ni d’Hitler, qui tenterait son premier coup d’état dix ans plus tard.
Personne n’imaginait non plus qu’un attentat terroriste parmi d’autres allait déclencher, par le jeu des alliances, une première guerre mondiale à laquelle allait succéder une grande crise économique, puis une deuxième guerre mondiale. Ni que le régime soviétique, né de la première guerre mondiale, ne s’effondrerait que 75 ans plus tard.
Aujourd’hui, les mêmes forces de progrès et de liberté s’expriment; les mêmes grondements existent; les mêmes mouvements destructeurs. La même crise economique. La même tentation d’en sortir par le protectionnisme, la violence et même la guerre, au moins froide.
Regardons lucidement le monde d’aujourd’hui : une très brève période vient de se clore où il n’existait plus aucune guerre entre deux pays, nulle part dans le monde.
Désormais un arc de la violence fait le tour du monde : une guerre au Mali, des conflits en Libye (qui a libéré un puissant armement classique) , un conflit entre Israël et la Palestine, une guerre civile en Syrie (qui peut libérer d’effrayantes armes chimiques), des tensions entre Israël et l’Iran, une guerre en Afghanistan, une tension entre l’Inde et le Pakistan, entre la Chine et le Japon, pouvant impliquer son allié américain, pour redescendre au Mexique, au Brésil et, par le biais des cartels de la drogue, rejoindre la Guinée équatoriale et le Mali.
Tout se met donc en place pour que menace une troisième guerre mondiale.
Nul ne sait seulement où aura lieu l’équivalent de l’incident de Sarajevo qui déboucha sur Août 14 : sur les iles disputées entre la Chine et le Japon, sans doute.
Pour l’eviter, il faut clairement distinguer le combat contre le terrorisme narco-islamique, que tous doivent mener, sous forme d’une action de police internationale ( où sont au Mali les Allemands? Les Anglais? Les Américains? ) des disputes, souvent dérisoires de territoires entre nations, qui doivent faire l’objet d’arbitrages civilisés.
Si on ne pose pas clairement ces principes, si on laisse nos économies se fermer et les guerres commencer, on court à une épouvantable catastrophe, dont on ne sortira, si tout ressemble au siècle passé, qu’en 2089, après, toute proportions gardées, plus de 200 millions de victimes.
J@attali.com