Ce qui se passe en Corée donne le sentiment qu’un conflit armé de grande ampleur n’est pas à exclure : Après le bombardement d’une ile sud coréenne par la Corée du Nord, la Corée du Sud à décidé de s’armer ; la Corée du Nord menace « d’annihiler » la Corée du Sud; le Japon se « prépare à toute éventualité ». Et si les deux Corées entrent en conflit, les Etats-Unis et la Chine soutiendront militairement leur allié. Et cela se déroule là où se rencontrent la Russie et la Chine, carrefour où bien des conflits sont prévisibles.

Cette tension arrive au moment où la crise économique semble dans une impasse. Et bien des crises antérieures, ne trouvant pas de solution dans la paix, l’ont trouvé dans la guerre, qui a permis à un pouvoir central renforcé de mobiliser des ressources gratuites.

Aujourd’hui, alors que, comme dans une avalanche, la taille des problèmes financiers ne cesse de grandir, les dirigeants ne s’occupent que de sauver les apparences, de gagner du temps, par mille et un expédients, en attendant un miracle. Il pourrait prendre la forme d’un formidable progrès technique, d’une remise en ordre des finances de la superpuissance, de la naissance d’une nouvelle superpuissance ou d’une redistribution des richesses au profit des plus pauvres pour les rendre solvables. Tout cela a eu lieu, dans d’autres crises. Mais aujourd’hui, rien de tel ne semble vraisemblable.

Restent alors deux sorties de crises : l’inflation et/ou la guerre.

L’inflation permettrait de faire disparaitre une partie des dettes publiques et privées, et de remettre à niveau les bilans des banques. Elle est au bout de la route de la création monétaire illimitée d’aujourd’hui, mais elle ne viendra que lorsque l’on rencontrera la contrainte de rareté des capacités de production et des matières premières. On en est encore loin.

La guerre permettrait de faire taire les protestations sociales, de faire travailler plus pour moins, de justifier la transformation de la dette publique en impôt, et de faire disparaitre des infrastructures, obligeant à les reconstruire.

On a déjà vu cela plusieurs fois dans l’ Histoire. En particulier, la résolution de la crise des années 30 ne doit rien à Keynes et tout à l’entrée en guerre des Etats-Unis.

Cela parait aujourd’hui invraisemblable. D’une part, il y faut des guerres d’une ampleur considérable : Pour qu’une guerre soit aujourd’hui de la même ampleur relative que la deuxième guerre mondiale, il faudrait qu’elle fasse plus de 150 millions de morts. D’autre part, les guerres d’aujourd’hui opposent des nations à des groupes non étatiques, ce qui n’exige pas, pour l’instant, la même mobilisation de ressources gratuites au service de la collectivité que la guerre entre nations : c’est une affaire de spécialistes.

Cela pourrait changer : On peut imaginer une mobilisation de masse contre le terrorisme, avec les mêmes conséquences économiques qu’une guerre entre nations. Cela suppose que cristallise une peur encore diffuse, qui permettrait d’imposer une réorganisation des pouvoirs au profit du militaire et la mise à l’écart des revendications sociales.

L’évolution de la stratégie de l’OTAN, qui devient progressivement une alliance planétaire des démocraties contre les pirates et terroristes, étatiques ou non étatiques, va dans cette direction. Comme va dans cette direction toutes les formes de glorification de l’identité nationale et de refus des autres.

Une telle évolution n’est pas plus invraisemblable que ne l’était la crise actuelle il y a cinq ans. Et si aucune autre solution ne réussit à enrayer la dépression qui menace, on trouvera des prétextes pour la mettre en œuvre.