Quand les revenus d’une personne, d’une famille, d’une entreprise, d’une association, d’une université, d’un hôpital, ou d’une collectivité publique stagnent ou baissent, la réaction naturelle de celui qui tient les cordons de la bourse est de refuser de réduire les dépenses, de chercher à tout faire pour augmenter ses revenus : et s’il n’y parvient pas, de s’endetter pour maintenir son niveau de vie. Jusqu’à ce que cela devienne impossible.

C’est désormais le cas, en occident, pour la plupart des gens et des organisations : la dette a atteint un niveau tel qu’il faut la réduire avant qu’elle ne conduise à la faillite.

Beaucoup pensent alors que, pour la réduire et pour vivre selon ses moyens, va s’imposer au mieux la rigueur ou l’austérité ; et au pire une réduction massive du niveau de vie.

Ce raisonnement est faux, parce qu’il refuse de voir qu’il est possible d’atteindre le même niveau de services avec moins d’argent ; en repensant les dépenses.

Il ne s’agit pas évidemment de dire aux plus pauvres qu’ils doivent manger moins. Ni à ceux qui sont confrontés à des dépenses contraintes (pour se transporter, se former ou s’instruire) de les réduire. Ce qui suit ne concerne donc que ceux des citoyens qui, à partir d’un certain niveau dans la classe moyenne, peuvent réfléchir à faire aussi bien avec moins. Et cela concerne aussi toutes les entreprises ; tous les ministères, toutes les organisations.

Chacun d’entre nous doit donc se poser ces questions simples et radicales : ne peut on réduire sa consommation d’énergie ? Ne peut-on acheter autrement sa nourriture ? ses vêtements ? Ses vacances ? Ses livres ? Sa musique ? Chacun d’entre nous aurait beaucoup à gagner à se livrer honnêtement à cet exercice. Il s’apercevrait qu’il y a dans les budgets les mieux tenus d’innombrables économies possibles ; et utiles, même si elles sont minuscules.

Chaque entreprise doit aussi se demander comment rendre le même service en repensant totalement son organisation. En accélérant la mise en place du progrès technique, en particulier de l’informatique ; en regroupant des services, en mettant en concurrence des fournisseurs, en gérant mieux ses frais généraux.

Chaque ministère peut et doit en faire autant : au lieu de réclamer plus de moyens au ministre du budget, qui ne peut que les refuser, chaque ministre dépensier devrait, en particulier dans la préparation qui commence du budget 2013, réfléchir très concrètement à ses missions, repenser très audacieusement son organisation, et concentrer les aides qu’il distribue sur ceux qui en ont vraiment besoin.

Les universités, les hôpitaux, les mairies, les régions, les coopératives, les syndicats, les associations doivent en faire autant.

Repenser la dépense doit devenir le mot d’ordre absolu. Si chaque famille, chaque entreprise, chaque commune, département, région, ministère, université ou autres se lançait dans cet examen (qu’on appelle parfois, en langage de consultant, le « budget base zéro »), l’économie aurait plus de compétitivité, la vie serait plus agréable, le poids de la dette diminuerait, la société irait beaucoup mieux.

Encore faut-il avoir le courage d’affronter les rentes, de dénoncer les petits arrangements entre amis, d’accélérer les réformes.

Naturellement, cela suppose de mettre en place des moyens d’accompagnement, pour favoriser les transitions et pour ne pas avoir à défendre des emplois dépassés en se donnant les moyens, par une efficacité renouvelée, d’en créer de nouveaux, plus intéressants, plus utiles ; plus valorisants.

Le moment est venu de le faire ; comme tous les grands rendez-vous, cela constitue à la fois une nécessité et une opportunité. Maintenant. Ou jamais.