Après la tragédie et la catharsis émotionnelle qui a rassemblé tous les français, ou presque, dans le deuil, la rage et la révolte, il faut au plus vite agir, pour que tout cela ne soit pas le début d’une longue série de drames, mais un des derniers soubresauts d’un fanatisme anachronique.
Et agir, c’est quoi? Il appartient d’abord, immédiatement, au Président de la République, de proposer un plan d’action majeur. C’est aussi, à la représentation nationale, d’en débattre et de le voter.

Une dimension évidente de ce plan doit porter sur la sécurité des lieux et des personnes; sur la meilleure surveillance de tous ceux qui peuvent, de près ou de loin, s’approcher de ces violences; et par d’avantage de sanctions. Cela passera évidemment aussi par beaucoup plus de moyens en matière de renseignement, de protection et de sanction. En France et hors de France.

Le terrorisme prendra de nouvelles formes. Il est une dimension de la « somalisation  » du monde. C’est elle qu’il faut combattre. En France, au Nigeria, au Moyen Orient. Et ailleurs.

Mais cela ne suffira pas. Car ce n’est pas en supprimant les libertés qu’on les défendra.
Il faut s’attaquer a l’essentiel : l’enseignement.

Les trajectoires des derniers terroristes montrent en effet que, nés en France, ils ont manqué mille et une occasions d’intégration et de réussite.

De plus, les comportements des élèves, dans certains collèges et lycées confirment le fossé qui se creuse entre une partie, minime, de la jeunesse et le modèle laïc et républicain de la société française. Et ce modèle est notre plus précieux trésor.

Par ailleurs, le chômage, le déclassement, les multiples frustrations sociales sont les plus efficaces alliés de ces fanatismes.

Alors, tout doit être fait, de la prime enfance jusqu’à l’âge adulte, de la famille aux lieux de travail, pour former, intégrer, orienter, soutenir, accompagner.

Tous doivent y concourir : parents, maîtres, chefs religieux, dirigeants politiques, écrivains, journalistes.

C’est donc le moment de se souvenir que l’enseignement des valeurs de la République doit commencer en maternelle; qu’on ne peut laisser tant d’élèves des collèges et des lycées partir dans une dérive sectaire faute d’une formation adaptée; qu’on ne peut laisser tant de jeunes sortir de l’enseignement sans diplôme; que la formation permanente doit rattraper ceux que l’école a perdu et s’adresser en toute priorité aux chômeurs pour leur fournir des compétences; que la formation doit continuer aussi partout, jusqu’en prison même, où on ne doit pas laisser se cristalliser la désespérance.

Aux artistes aussi, de savoir parler de cela, par le cinéma, le théâtre, le roman, la musique.
Mais, plus encore, pour y parvenir, tout dépendra du dialogue quotidien, tolérant, empathique, ferme et souriant, entre nous, tous les français.

A nous de tendre la main aux plus démunis, aux plus désorientés, aux plus agressifs. A nous, de débattre, d’aider, de soutenir. Sans rien attendre des politiques. A nous d’être fraternels.

A nous de faire vivre les valeurs de la République, de montrer qu’on peut écouter l’autre, ne pas le laisser, jamais, au bord de la route.

A nous, d’aller au devant des plus perdus d’entre nous, pour leur parler, leur donner confiance en eux, les aider à comprendre qu’une vie réussie est possible hors de la haine et de la paranoïa.
De ces chocs, nous sortirons alors grandis.

C’est au bord du précipice qu’on prend conscience de l’urgence de vivre.