Chacun peut voir, à tout un ensemble de signes, que le monde va très mal. De plus en plus mal. Et chacun, face à cela, semble pris d’un vertige, comme hypnotisé par le vide qui s’annonce sous nos pieds. Au mieux, paralysé; et au pire, attiré vers lui.

Comme si la catastrophe qui s’esquisse était perçue comme la seule façon de créer les conditions pour agir. Comme si elle était l’unique substitut possible à l’action. Comme si la réforme était si difficile à vouloir qu’il fallait en passer par la table rase .

Comme si, face à l’imminence du désastre, seule sa concrétisation pouvait signifier délivrance.

Car le désastre est à nos portes. Qui ne le voit ?

1. La situation économique mondiale s’aggrave. Partout,la récession s’installe et la déflation s’en mêle. Les raisons en sont multiples: la technologie, la concurrence, la surproduction, la faiblesse des syndicats, la concentration des pouvoirs, l’absence de régulation, l’attentisme, la défiance. Un tsunami s’annonce qui pourrait emporter bientôt les marchés financiers; et que les Etats endettés ne pourraient enrayer.

2. La situation militaire se détériore: en Syrie, en Irak, en Israël, en Palestine, dans tout le Moyen-Orient, en Afrique sub-saharienne, entre la Chine et le Japon.

3. La situation écologique dérape: la température de la planète augmentera d’au moins 2 degrés et peut-être 6 d’ici la fin du siècle… et la Cop 21 ne semble pas pouvoir l’éviter.

4. Plus de 5 millions de réfugiés politiques potentiels sont aux portes de l’Europe.

5. Pire, la situation idéologique devient désastreuse: au lieu de penser positif, de chercher constructivement des solutions à ces problèmes encore solvables, on s’enferme, on exclue, on refuse l’autre. Partout. De mille façons. L’élection suisse d’hier en est un nouveau signe.

La cristallisation de ces 5 dimensions conduira au pire. Et un enchaînement épouvantable est devant nous: la crise économique et sociale accélérera la victoire politique des partis extrêmes; leur égoïsme conduira à la fermeture des frontières et à l’exclusion, qui conduiront à l’affrontement.

Aussi, si, dans deux ans, des drapeaux noirs se lèvent sur les principaux bâtiments publics du monde il ne faudra pas s’en étonner.

Qu’on ne me dise pas que je noircis le tableau. Pas un dirigeant économique, politique, industriel,  financier, social, environnemental sérieux, dans le monde, qui ne partage  en privé ce diagnostic.

Et pourtant, rien n’est fait. Alors qu’il est encore possible d’enrayer ce processus. A condition d’agir vite. Massivement. Mondialement.

Une occasion se présente pour l’amorcer : le prochain sommet du G20 a Antalya, en Turquie, le 15 et 16 novembre prochain. Si les dirigeants politiques du monde veulent bien prendre conscience de la situation et reconnaître publiquement sa gravite, ils peuvent prendre immédiatement les 5 décisions suivantes.

1. Lancer, en le finançant par les énormes capitaux dormants, un programme massif d’investissements publics, pour réduire la pauvreté, généraliser à tous les réseaux numériques maîtriser les gaspillages d’énergie et créer des emplois durables.

2. Décider de consacrer avant 2025 les 100 mds de dollars nécessaires à la satisfaction des besoins d’économies d’énergie des pays du Sud.

3. Mettre en place des procédures de polices et de stabilité militaire par l’alliance des cinq membres permanents du conseil de sécurité.

4. Prendre l’initiative d’un vaste dialogue des civilisations et des religions, en affirmant que chacune a beaucoup a apprendre des autres.

5. Organiser la coordination des principales Banques centrales, pour que leurs actions massives donnent du temps aux actions gouvernementales de faire leurs effets.

Pour que tout cela ait lieu, il faudrait que chacun d’entre nous pense positif, se réveille, agisse pour lui-même, soit tolérant avec les autres et frappe à toute les portes possibles, pour que les dirigeants agissent. Ou pour remplacer au plus vite ceux qui n’en auraient pas le courage.