Quelles sont les conséquences, pour l’Europe, de l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche?

D’abord, cela signifie que les Etats-Unis auront, pour 4 ans au moins, le même président. Donc, une certaine vision de l’avenir, d’où découlera une stratégie. Et celui-là a une vision du rôle des Etats-Unis beaucoup moins universaliste que tous ses prédécesseurs, au moins depuis  quatre-vingt ans.

Donald Trump est clairement isolationniste. En particulier, il veut laisser à l’Europe le soin de se défendre, rapatrier aux Etats-Unis les usines américaines aujourd’hui installées en Europe, ou qui voudraient s’y implanter. Il se moquera de la parité du dollar et le laissera plonger si cela peut attirer des investissements aux Etats-Unis  et pousser le reste du monde à consommer des produits américains.

Plus généralement, cette élection place l’Europe dans une situation géopolitique radicalement neuve : Pour la première fois, elle se trouve face à trois grands pays dont les dirigeants ont du temps devant eux, avec une stratégie claire, dont l’alliance avec l’Europe ne fait pas partie.

Outre les Etats-Unis de Trump, la Russie de Poutine voudra, comme un bon joueur d’échec, reconstituer son statut de grande puissance, en reprenant ses places fortes et en s’assurant que l’Europe ne peut lui nuire, ni économiquement, ni militairement. La Chine de Xi Jinping voudra, comme un bon joueur de go, nouer des alliances sur la planète entière pour affirmer sa puissance et assurer son approvisionnement en matières premières, en affaiblissant, par conséquent, les réseaux d’alliance, et les positions d’influence des autres, dont les Européens.

Pour les trois plus grandes puissances du monde, l’Europe n’est plus un partenaire, c’est une proie. Et ils feront tout pour l’affaiblir, tout en jurant le contraire.

Face à ces appétits, les trois dirigeants les plus importants de l’Europe, sont paralysés, pour toute l’année 2017, par des élections, programmées en France, en Allemagne, et à la Présidence de l’Union. Sans compter toutes les forces centrifuges en Italie, aux Pays Bas, et en Europe centrale.

C’est donc, pour les trois autres superpuissances, l’année rêvée pour se débarrasser d’un rival potentiel ;  et, pour cela, ils joindront leurs forces avec ceux qui, en Europe même, veulent défaire l’Union.

Car il n’y a qu’en Europe que des gens croient que l’Union Européenne ne peut pas etre la première puissance du monde au 21ème siècle. Il n’y a qu’en Europe que des gens veulent revenir au provincialisme des petits espaces, quand ils ont la chance de pouvoir construire une grande nation, démocratique et souveraine, de la même taille que ses principaux rivaux.

Qu’on le veuille ou non, dans un monde irréversiblement connecté, la puissance, (c’est-à-dire le niveau de vie, l’emploi, la démocratie, la souveraineté, et la liberté) appartiendra aux nations les plus peuplées, disposant du plus d’espaces, de ressources naturelles, d’accès à la mer. Les petits pays ne pourront survivre que par un très délicat jeu d’alliances, comme le Japon ou la Grande Bretagne, ou en situation sans cesse militarisé, sans cesse assiégée, comme Singapour ou Israël. De cela, on peut multiplier les exemples. Sans contrexemples.

Tel est l’enjeu de 2017, pour les Européens : survivre aux attaques venant de l’extérieur, et de l’intérieur, les uns se mettant, sans le savoir ni le vouloir, au service des autres.   Pour cela, il faudra, sans même attendre 2018, lancer le grand projet d’une Europe de la Défense. Si on ne le fait pas, les évènements nous y contraindront ; et il sera peut etre trop tard.